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Publié : 29 août 2008

P. Meirieu : ce que doit être le service public

La responsabilité de chacun en place du contrôle tatillon, l’évaluation rigoureuse de nos actions dans le cadre du conseil pédagogique en place de l’inspection, l’évaluation sans faille des politiques d’établissement en place de l’irresponsabilité couverte par les recteurs et le dialogue et la formation comme réponse à nos insuffisances individuelles ou collectives, je fais un rêve ;-)

Un service public, en particulier d’éducation, doit se caractériser par un cadrage national fort sur des objectifs nationaux ambitieux et une responsabilisation des acteurs sur les moyens de les réaliser…

Tout le contraire de ce à quoi nous sommes assignés aujourd’hui : un cadrage technocratique sur les moyens accompagné d’un abandon de l’État sur les politiques réelles des établissements, un contrôle tatillon des « résultats » [...] et une libéralisation des projets (qui peuvent ignorer, en toute impunité, des objectifs comme la formation des élèves à l’autonomie documentaire, l’information régulière et respectueuse des familles, le respect d’une laïcité constructive…).

Un service public, en particulier d’éducation, doit se caractériser aussi par le fait qu’on identifie le bon maillage en matière de gestion optimale des décisions.

Si les décisions concernant les programmes doivent rester nationales, si les décisions techniques locales doivent être prises au niveau des collectivités territoriales, les décisions pédagogiques requièrent, elles, des « structures fonctionnelles » à taille humaine.

Nous devons, pour cela, créer des « unités pédagogiques » de quatre-vingt à cent vingt élèves (ce sont les chiffres qui émergent des études internationales) affectées à des équipes d’enseignants qui en assument la responsabilité complète.

[...]

Un service public, en particulier d’éducation, doit se caractériser, par ailleurs, par le fait que les dysfonctionnements – inévitables dans toute entreprise humaine – y sont traités en interne et de manière collective.

Pour dire les choses simplement, dans le « privé », ceux qui ne sont pas contents sont sommés d’aller voir ailleurs et de faire jouer la concurrence. Dans le « public », ceux qui constatent, comme « usagers », que des choses ne vont pas, doivent pouvoir intervenir en tant que « citoyens » pour, d’abord, poser le problème et, ensuite, exiger que des professionnels compétents cherchent avec eux des solutions.

Un service public se caractérise par le fait qu’il existe des systèmes efficaces permettant de travailler en interne sur les dysfonctionnements et non d’en partir parce qu’on est mécontent. [...]

Un service public, en particulier d’éducation, doit se caractériser, enfin, par le fait qu’il est porté par la Nation dans une perspective résolument volontariste. Il incarne le bien commun et l’avenir.

[...]

Une « Éducation nationale » qui déboussole ses enseignants, décourage ses militants pédagogiques, désespère les meilleurs de ses cadres, réduits les parents à n’être que des « consommateurs d’école » n’est plus digne de porter ce nom.

Voir en ligne : Bloc-notes de P Meirieu